Scène touchante de cette petite fille de 8 ou 9 ans venue avec sa classe l’autre jour qui entre aujourd’hui avec maman et frère après l’école, leur offrant une visite guidée et commentée de toute l’exposition. Le papa sera entraîné le lendemain.
Vivre à la colle avec ses propres toiles durant 15 jours met de la distance entre elles et soi. Il faut toutefois se méfier de ce recul, un recul tel qu’il serait facile de tomber en arrière et de se casser le dos. Ce serait un trop bon prétexte pour ne pas retourner à l’atelier.
deuxième vendredi
"Il y a un sens de visite ?” me demandent nombre de visiteurs en entrant. Me plais à répondre : “Non, tout ça n’a aucun sens”.
Un groupe est entré pour admirer… le bâtiment, une ancienne grange à dîme dont la commune est très fière. Tout accaparés qu’ils étaient par la charpente et la restauration, ils n’ont absolument pas remarqué qu’il y avait là quelques dizaines de toiles accrochées. Humilité, je t’avais un peu oubliée.
troisièmes samedi et dimanche
Au milieu de tous ces gens au milieu de mes toiles, j’ai le trac du prochain retour à l’atelier. Du retour au travail, au mutisme ou au soliloque, après avoir tant parlé aux autres, conversé, expliqué, suggéré, répondu, montré, dit et surtout non-dit. Début d’une hibernation laborieuse, recommencement d’un silence coloré et plein de taches. Une hâte, une excitation, et une peur des retrouvailles. Vingt jours sans peinture et le manque est là, teinté de l’appréhension de ce changement brutal d’activité.
De nombreuses personnes se rappellent la très prochaine clôture et se dépêchent de venir. Ils m’empêchent d’écrire mon journal, et c’est tant mieux.