lundi 21 mai 2012

Modigliani, Soutine, et les autres

Des affiches plein le métro, plein les bus, plein Paris. On annonce une exposition Modigliani et Soutine, sous-titrée “l’aventure de Montparnasse”. La Pinacothèque de Paris met les petits plats dans  les grands pour sa communication à la limite du mensonge. L’affiche est très réussie, prometteuse,  un beau portrait, détail d’une toile de Modigliani.  Et ça marche. On entend partout :
Il y a une expo Modigliani et Soutine à Paris, tu l’as vue ?
Ah ! Modigliani, j’adore. Et Soutine ! Ah!
Etc.
Oui, il y a bien dans cette exposition quelques Modigliani,  quelques Soutine, mais il y a aussi et ça, personne ne nous le dit, des piètres Valadon (un pléonasme), des Utrillo comme s’il en pleuvait, banal paysagiste dont tellement d’œuvres sentent la “toile à rendre”, la peinture à la manivelle... Et puis tous les autres, qui font finalement l’essentiel du contenu des salles tarabiscotées de la Pinacothèque, et ne sont qu’un ramassis de croûtes dignes des pires salons de peinture de nos beaux villages français... Le plus trompeur dans cette histoire c’est d’une part la présentation de l’exposition sur le site de la Pinacothèque, qui parle d’“artistes formidables”, d’“ensemble d’œuvres étourdissantes de beauté”, des “œuvres jamais exposées”, etc. (c’est vrai, j’ai été étourdi par la “fillette en bleu” de Modigliani, mais je l’avais déjà vue au Luxembourg il y a quelques années…), et d’autre part les panneaux explicatifs répartis tout au long du parcours de l’exposition (dans des recoins mal agencés, ce qui provoque de beaux embouteillages et  gêne la visite) qui nous rabâchent sans vergogne, comme s’il fallait nous en persuader, que ce Netter avait un goût très sûr. Comment a-t-il pu acquérir, avec ce goût si sûr, ces Kisling maladroits autant que prétentieux, ce terrifiant nu de Derain, et tout ces oubliés dont j’ai d’ailleurs aussitôt oublié le nom ?  On nous dit qu’ils font partie pour beaucoup d’entre eux de l’Ecole de Paris, c’est apparemment loin d’être un gage de qualité. Vivre et peindre à Montparnasse à l’époque ne signifie pas forcément avoir le talent, la profondeur et la force de Modigliani ou de Soutine.
En définitive, le seul intérêt de cette exposition au titre décidément mensonger est de montrer que l’art médiocre ne fait pas de progrès. C’est payer fort cher pour avoir confirmation de ce qu’on savait déjà.
Mieux vaut donc attendre octobre prochain et l’exposition d’Orsay consacrée à Chaïm Soutine. Il sera exposé sans les autres.